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Fwd: Re: Je refuse la privatisation de la justice numérique et le filtrage du Net français.



Voici la réponse de mon député à la lettre de l'association ODEBI sur le projet
de loi LEN en cours.

----- Forwarded message from Renaud DONNEDIEU DE VABRES
<contact@rdonnedieudevabres.com> -----
    Date: Tue, 13 Jan 2004 18:24:27 +0100
    From: Renaud DONNEDIEU DE VABRES <contact@rdonnedieudevabres.com>
Reply-To: Renaud DONNEDIEU DE VABRES <contact@rdonnedieudevabres.com>
 Subject: Re: Je refuse la privatisation de la justice numérique et le filtrage
du Net français.
     

Monsieur,



Vous avez appelé mon attention sur le projet de loi pour la confiance dans l
'économie numérique et, plus particulièrement, sur le dispositif de mise en
jeu de la responsabilité civile et pénale des prestataires techniques.



Ce régime de responsabilité est fixé par l'article 2 du projet de loi qui
transpose l'article 14 de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce
électronique. Il modifie à cet effet les articles 43-8 et 43-9 de la loi du
30 septembre 1986, tels qu'ils avaient été rédigés par celle du 1er août
2000.



Le mécanisme proposé par l'article 14 de la directive du 8 juin 2000 a pour
objectif de mettre en place une responsabilité de l'hébergeur quant au
maintien en ligne d'une information litigieuse, dès lors qu'il a
connaissance de la présence de cette information sur son site.



Comme vous le savez, il s'agit d'un dispositif résultant d'une négociation
interétatique communautaire. La France ne peut donc s'en exempter
unilatéralement et doit le transposer.



Conformément à cette directive, le projet de loi n'instaure pas une
obligation générale de surveillance des contenus, qui serait techniquement
impossible, mais une simple obligation de moyens. La responsabilité de l'
hébergeur est limitée. Elle ne peut être engagée que s'il a eu connaissance
du caractère illicite des informations diffusées et n'a rien fait, compte
tenu de l'état de l'art, pour y mettre un terme.



En outre, ce dispositif, dont vous considérez qu'il revient à privatiser la
justice numérique, n'exclut nullement l'intervention du juge. En effet, la
responsabilité de l'hébergeur sera engagée sous le contrôle du juge, à la
fois pour sanctionner les défaillances de l'hébergeur, s'il manque à son
devoir de retrait, mais aussi pour assurer sa protection, s'il est confronté
à une demande abusive de retrait de la part d'un internaute. Cette
disposition a été votée sur l'initiative de mon collègue Patrice
Martin-Lalande. Elle organise une réelle protection de l'hébergeur, qui s'
appuie au besoin sur le recours à une procédure de notification.



Il me semble enfin essentiel de souligner que ce dispositif poursuit un
objectif qu'aucun d'entre nous ne saurait contester : celui de faire cesser
des contenus dont la diffusion est constitutive d'infractions
particulièrement odieuses, qu'il s'agisse de l'apologie de crimes de guerre,
d'incitation à la haine raciale ou de pédophilie.



Je suis, tout comme vous, attaché à la liberté du monde de l'internet, mais
également soucieux qu'il ne devienne pas un espace de non-droit. Les sites
internet et les internautes se comptent aujourd'hui par millions, ce qui
nécessite aussi d'adapter les procédures.



A cet égard, le régime de responsabilité limitée des prestataires techniques
que le projet de loi met en place, me parait ajusté à l'échelle des sources
potentielles de différends, dans la mesure où il permet de régler des
situations dans l'instant, sous le contrôle a posteriori du juge.



Souhaitant que ces quelques précisions aient pu répondre à vos
préoccupations, je vous prie, de croire, Monsieur, en l'assurance de mes
sentiments les meilleurs.



Renaud Donnedieu de Vabres

Député d'Indre-et-Loire

Conseiller municipal de Tours


----- Original Message ----- 
From: <julienlavergne@free.fr>
To: <rdonnedieudevabres@assemblee-nationale.fr>
Sent: Friday, December 26, 2003 12:52 PM
Subject: Je refuse la privatisation de la justice numérique et le filtrage
du Net français.


JULIEN LAVERGNE
APP 327 - 18 RUE RABELAIS
37300 JOUE LES TOURS

Monsieur,

en  tant  qu'élu, vous devez écouter et prendre en compte l'inquiétude
de l'ensemble des acteurs du Net français, professionnels, et citoyens
numériques :
L'inadéquation  des  textes actuels à la réalité du Net a provoqué des
affaires  juridiques qui ont soulevé de très nombreuses protestations.
Ainsi,  c'est  plus  de 90% des forums communautaires français qui ont
fermé  leur  portes  lors  des  affaires  Perenoel.fr,  CPAM Nantes et
Domexpo.  A cette occasion, c'est plus de 40.000 pétitions qui ont été
signées  pour demander des textes clairs protégeant les intermédiaires
techniques   et   la   liberté   d'expression.
La  seule réponse du Gouvernement fut le projet de loi pour l'économie
numérique,  qui,  tout  le  monde le sait, provoque l'unanimité contre
lui.
C'est  plus  de  30.000 mails qui ont été envoyés à Jacques Chirac, et
autant  à  Jean-Pierre  Raffarin afin de protester contre le projet de
loi de Nicole Fontaine.
A  une  exception  près  (les  majors), la totalité des acteurs du Net
français    (professionnels,    fournisseurs    d'accès,   hébergeurs,
prestataires   de   forums,   associations  d'internautes,  syndicats,
magistrats,   ONG...)   a  rejeté  ce  projet  de  loi  irréaliste  et
liberticide.

Qu'il soit clair que les citoyens numériques n'accepteront pas:
- le moindre rétrécissement des prérogatives de l'autorité judiciaire,
dont l'indépendance et l'impartialité doivent rester absolues, et,
partant, toute tentative de privatisation de la justice numérique.
- que des opérations de police soient confiées à des entités privées.

En  pratique,  au  moins  deux points clefs du projet de loi de Nicole
Fontaine   sont  contraires  tant  aux  valeurs  républicaines  qu'aux
principes  fondamentaux  du droit. En effet, les articles 43-8 et 43-9
de  ce projet instaureraient une justice privée sur le Net en imposant
aux   intermédiaires   techniques   de   se  substituer  à  l'autorité
judiciaire,  et  l'article  43-12  ferait  de  la  France le seul pays
occidental  à  imposer un filtrage du Net à ses frontières, comme cela
se fait par exemple en Chine populaire.....

Point clef 1 : Privatisation de la justice numérique:
-----------------------------------------------------
Les Articles 43-8 et 43-9, même modifiés par le Sénat, au but apparent
d'engagement  de  la  responsabilité  des  "hébergeurs"  (?)  que l'on
considèrererait  comme  des  complices,  imposent  en  réalité  et  en
pratique à ces intermédiaires techniques le devoir de se substituer au
juge,  et d'appliquer les peines, en l'occurrence la censure, qui plus
est  avec  promptitude,  avant  toute  décision de justice établissant
l'illicéité d'un contenu.

Ils  deviendraient  donc,  le  cas échéant, coupables de ne pas s'être
substitués à l'autorité judiciaire.

Que  chacun,  dans une société responsable, soit amené à se forger une
opinion  de  ce  qui  est  illicite  ou  non, et décide, au besoin, de
s'adresser à l'autorité idoine : Rien de plus normal et souhaitable.
En  revanche,  on  n'a  jamais  vu  en  France que quiconque puisse se
substituer  à  l'autorité judiciaire, juger, et appliquer une peine en
son  lieu  et  place : Or, on peut toujours se voiler la face, mais il
n'en  restera  pas  moins  que  c'est -en réalité et en pratique- très
exactement  ce  qu'exigent des hébergeurs les articles 43-8 et 43-9 du
projet de loi de Nicole Fontaine.

Les  internautes français se verraient donc jugés et censurés de façon
expéditive par des groupes privés.

Gênés  par l'évidente censure généralisée à laquelle ce texte ouvre la
porte,  les  sénateurs  ont adopté un nouvel article 43-9-1 instituant
une  infraction  pénale  :  celle  de  présenter une information comme
illicite pour en demander le retrait, c'est à dire de se substituer au
juge en affirmant l'illicéité d'un contenu pour le faire censurer.

On  a  donc,  dans  le même texte, des articles immédiatement connexes
rendant  les  uns  coupables  de ne pas s'être substitués à l'autorité
judiciaire,  et les autres coupables de s'être substitués à l'autorité
judiciaire.


Point clef 2 : Filtrage aux frontières (une ligne Maginot numérique):
---------------------------------------------------------------------
L'article   43-12  quant  à  lui,  dit  en  substance  que  l'autorité
judiciaire  peut demander aux fournisseurs d'accès et aux "hébergeurs"
(?)  de  supprimer  un  contenu  s'il  est hébergé en France, et de le
filtrer s'il est situé à l'étranger.

Si  la  suppression  d'un  contenu  hébergé  en  France  ne pose aucun
problème  particulier,  il  n'en  va  pas de même pour le filtrage des
contenus hébergés à l'étranger :

Outre  que l'adoption de cette mesure constituerait un choix politique
unique  dans  le  monde  occidental, le législateur doit savoir que la
réalité  technique  est  que cela ne marche pas. On pourra par exemple
consulter  à  ce  sujet  l'étude complète de l'expert J.R Lemaire, qui
explique  que  pour  la tentative de filtrage d'un site (qui pourra au
demeurant être déplacé ailleurs dans la seconde qui suit, et ce autant
de  fois  que  nécessaire)  c'est jusqu'à des centaines de milliers de
sites  -eux  parfaitement  légaux- qui deviendraient inaccessibles aux
internautes français.

Par   ailleurs,   l'implémentation   de  ces  techniques  de  filtrage
inefficaces   imposerait  un  profond  remaniement  de  l'architecture
technique  des  fournisseurs  d'accès,  dont  le coût important serait
nécessairement répercuté sur le prix des abonnements.

Enfin,  une  décision  judiciaire étant publique, ce serait l'autorité
judiciaire  elle-même  qui  ferait  de  la  publicité  pour  des sites
illicites alors même que du fait de l'inefficacité du filtrage le site
incriminé serait toujours accessible.

En résumé, ce filtrage serait : dévastateur, coûteux, et inefficace.

Si  aucun  pays  occidental  n'a  retenu  une  telle  mesure, c'est en
particulier  parce  qu'elle  est  totalement  inefficace  : Qu'on nous
explique  en  quoi  la France ferait exception? Parce qu'on a réussi à
arrêter le nuage de Tchernobyl?
Dominique  Perben n'a toujours pas répondu à la question qui lui a été
posée publiquement par les fournisseurs d'accès français le 27 février
2003 quant à la faisabilité de ce filtrage.

Comment   justifier   la   demande   d'instauration   d'une  procédure
_inefficace_  et  coûteuse,  là  où  la réalité pratique est qu'il est
nécessaire  et  urgent,  pour  avoir  un  _minimum_  d'efficacité,  de
développer une coopération internationale seule à même de supprimer en
particulier les contenus pédopornographiques et faire poursuivre leurs
auteurs et éditeurs?

L'unanimité des acteurs contre ce projet de loi :
-------------------------------------------------
Dès  la  publication du projet de Loi, de très nombreux acteurs du Net
français  et de la société civile ont protesté contre la privatisation
de  la justice numérique, le filtrage, ou la tentative de mise sous la
tutelle  du  CSA  :  que  ce soient les FAI par le biais de l'AFA, les
hébergeurs, les hébergeurs de Forums, des magistrats, des syndicats et
des ONG. La société civile a apporté un très large soutien aux actions
de   protestations   initiées   par  la  Ligue  Odebi,  la  Fédération
Informatiques   et   Libertés,   et   l'association  Iris.  C'est  par
_dizaines_de_milliers_   que  les  internautes  ont  ainsi  signé  des
pétitions contre le texte de Nicole Fontaine. Face à ce rejet général,
Nicole  Fontaine peut-elle citer au parlement _un_ acteur qui lui soit
favorable? Lequel?

Le  député  UDF  Dionis  (qui  connaît  bien  la réalité du Net, voire
certaines  de  ses subtilités) recevait en commission de très nombreux
acteurs,  et  proposait  des  amendements  tendant  à  rendre le texte
acceptable.  Claudie  Haigneré,  Ministre  des Nouvelles Technologies,
intervenait  publiquement  dans  le  même  sens  :  "Nous devons à nos
concitoyens  une  plus  grande  clarté  sur  le caractère des contenus
répréhensibles,  en  distinguant les contenus manifestement illicites,
tels  que  la  pédophilie,  l'apologie  des  crimes contre l'humanité,
l'incitation  à  la  haine  raciale, et les contenus dont le caractère
illicite est confirmé par décision de justice." Les amendements Dionis
allaient dans ce sens ... Nicole Fontaine les a fait retirer.
Au  sénat, en première lecture, le sénateur PS Weber déclarait :"à qui
revient le rôle de juger de la licéité d'un contenu, d'un texte, d'une
image  ?  Dans  notre  loi traditionnelle, ce rôle est dévolu au juge,
garant de nos libertés publiques"
Lors  de  la même séance, le sénateur UMP Trégouët, qui est sans aucun
doute   l'un   des   parlementaires  ayant  la  connaissance  la  plus
approfondie  du  Net, intervenait pour dénoncer la privatisation de la
justice  et  le  "flicage"  en  ligne  prévus  par le projet de Nicole
Fontaine.  Sa  perspicacité,  la  profondeur  de  son  analyse,  et la
prospective  qu'il  présentait  suscitaient  d'ailleurs  les  louanges
unanimes   de   ses   pairs.Il   affirmait   ainsi  on  ne  peut  plus
clairement:"les internautes n'ont pas à être jugés et censurés par des
groupes privés."
Et  Daniel  Raoul d'exprimer ses doutes : "[...] je me pose un certain
nombre  de questions, et les interventions de MM.Trégouët et de Ralite
m'interpellent.  Je  ne  suis  dès lors pas sûr que nous soyons tout à
fait prêts à adopter ce projet de loi."...


La réalité judiciaire:
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Deux  arguments  sont souvent avancés pour justifier les articles 43-8
et  43-9:  Ils  permettraient d'aller vite, et de ne pas encombrer les
tribunaux.  En  clair,  il  s'agit  d'instaurer  une justice privée et
expéditive.
A  supposer  que  le  législateur  soit  capable de trouver la moindre
justification à l'instauration d'une telle "justice", remarquons que :
-Concernant  la vitesse : il est à souhaiter que le gouvernement donne
à sa justice -fût-elle numérique- les moyens d'agir à la vitesse qu'il
convient.
-Concernant  l'encombrement  des  tribunaux  :  On voudrait nous faire
croire que les tribunaux seraient encombrés d'affaires liées au Net...
Comme si, par on ne sait quel tour de magie, un citoyen honnête voyait
sa  probabilité  de  devenir  un délinquant soudainement augmenter dès
l'instant où il se connecterait au Net! La réalité objective est qu'il
n'en  est rien : ces affaires sont peu nombreuses, et les décisions de
justice  qui  ont  été rendues sont d'ailleurs pleines d'enseignements
que le législateur ne peut ignorer :

-Altern
La première affaire dans laquelle un hébergeur a été condamné pour des
contenus  mis  en ligne par un tiers. Altern a donc disparu, ainsi que
tous  les  sites  qui y étaient hébergés...L'amendement Bloche a aussi
disparu,  censuré  par  le  conseil  Constitutionnel:  Depuis,  il est
clairement affirmé dans la Loi que la responsabilité d'un hébergeur ne
pourrait  être  engagée  que  dans  le  cas  où,  ayant  été saisi par
l'autorité  judiciaire,  il  ne  supprimerait  pas  le  contenu _jugé_
illicite.  Mentionnons  par  ailleurs  que l'Union Européenne a décidé
qu'aucune  obligation de surveillance des contenus ne peut être exigée
de  lui (ce qui semble assez raisonnable quand on a une petite idée de
la  quantité  d'informations  qui  circule sur le Net, ainsi que de la
vitesse  à  laquelle  il  est  possible de publier un contenu ou de le
déplacer).

-JeboycotteDanone
Le  20  avril  2001,  le site JeBoycotteDanone.com disparaissait de la
surface  du  Web,  les  intermédiaires  techniques  ayant  peur d'être
considérés comme coresponsables.
Il  s'agit  donc  de  l'exemple  type  de  ce  qui  pourrait se passer
systématiquement   si  l'assemblée  votait  le  texte  en  l'état.  En
engageant  la  responsabilité des intermédiaires techniques, on oblige
ces sociétés privées à minimiser rationnellement le risque judiciaire.
Les  seuls  critères  objectifs  à peu près fiables dont disposent ces
sociétés  pour  déterminer  si  elles  doivent  supprimer  un  contenu
litigieux  à  la  demande  d'un tiers sont : le poids économique et la
notoriété  médiatique  relatives  du client publiant le contenu, et du
tiers.  Elles donneront donc _rationnellement_ raison à celui des deux
qui  sera  économiquement ou médiatiquement le plus puissant : Ce sera
donc la censure au faciès économico-médiatique.
Dans  l'affaire  JeboycotteDanone,  on  a  donc  assisté  à la censure
_totale_  d'un  site par un intermédiaire technique. Et qu'a donc -par
la  suite-  demandé  le  juge dans cette affaire? Le simple retrait du
Logo  Danone...Le juge a estimé que le reste du site était légal. Fort
bien,  dans  ce  cas  on pourrait considérer que les acteurs impliqués
dans  cette  affaire  ont  servi  de  rats  de  laboratoire,  mais que
désormais  tout  intermédiaire technique sait qu'il suffit dans ce cas
de  figure  de  faire  retirer  un logo détourné..... Passons donc aux
affaires suivantes :

-GreenPeace vs Esso
Le  8  juillet  2002,  le TGI de Paris ordonne le retrait du Logo Esso
affiché  sur le site de GreenPeace. Décision qui semble donc confirmer
la  décision  rendue  dans  l'affaire  JeBoycotteDanone.  A  noter que
l'hébergeur   de   GreenPeace  qui  était  aussi  attaqué,  n'est  pas
poursuivi,  le  juge  constatant  qu'il  entend agir promptement. Cela
étant, GreenPeace fait appel...

-GreenPeace vs Areva
Le  26  juillet  2002,  le  TGI  de  Paris déboute le groupe nucléaire
français  Areva, qui demandait le retrait du Logo Areva affiché sur le
site  de GreenPeace. Cette décision est donc très exactement _opposée_
aux  décisions  rendues pour Danone et Esso.Les notions d'apparence et
d'évidence commencent à se diluer.....

-GreenPeace vs Esso (bis)
Le 26 février 2003, la cour d'appel de Paris _infirme_ l'ordonnance de
référé  du 8 juillet 2002 et condamne la société Esso. GreenPeace peut
donc  de  nouveau  afficher  le logo incriminé sur son site. On notera
tout  particulièrement  ce  passage  de  l'arrêt  de  la  cour d'appel
:"Considérant que le principe à valeur constitutionnelle de la liberté
d'expression  implique  que,  conformément  à  son  objet  statutaire,
l'association  GreenPeace  puisse,  dans  ses  écrits  ou sur son site
internet,  dénoncer  sous  la  forme  qu'elle estime appropriée au but
poursuivi  les  atteintes à l'environnement et les risques causés à la
santé humaine par certaines activités industrielles;"

-JeboycotteDanone (bis)
Le  30  avril  2003, la cour d'appel de Paris infirme le jugement du 4
juillet 2001, et condamne Danone.

-B2S Ceritex/Mediatel vs R@S/SudPTT
Le  22  Octobre  2003,  les  sociétés  Ceritex  et Mediatel mettent en
demeure  l'hébergeur  R@S,  exigeant qu'ils censurent tout contenu les
concernant  sur  le  site  sudptt.fr.  Rapidement,  l'association IRIS
venait  épauler  le R@S. Le 24 Novembre 2003, une ordonnance de référé
du  TGI  de  Paris  déboute les sociétés Ceritex et Mediatel de toutes
leurs  demandes  à l'encontre du syndicat sudptt et du R@S. Ceritex et
Mediatel  mettaient en cause la responsabilité du R@S, pour le contenu
des   informations  diffusées,  invoquant  un  trouble  "manifestement
illicite".  L'ordonnance  précise  utilement "qu'il appartient à cette
juridiction d'examiner l'existence alléguée du trouble en question, en
vérifiant seulement son caractère manifestement illicite éventuel".


Les forums de discussion :
--------------------------
-PèreNoël.fr vs DefenseConsommateur.org
Le  28  Mai 2002, le juge ayant refusé le sursis à statuer demandé par
l'avocate  de defense-consommateur en attendant que l'enquête en cours
au  Parquet  de  Créteil  pour  escroquerie  en  bande  organisée soit
terminée, le TGI de Lyon condamne le propriétaire de nom de domaine et
le  webmaster  de  DefenseConsommateur.org  à  verser  80.000 euros de
dommages  et  intérêts  à  pere-noel.fr pour des propos diffammatoires
postés  par  des  internautes  excédés sur le _forum_de_discussion_ de
defenseconsommateur.org. Le jugement est à exécution provisoire.Face à
l'ouverture  de  cette  brèche  juridique  qui  menace l'existence des
forums  de  discussion,  la  Ligue  Haut-Débit réagit, et organise une
grève générale des forums de discussions francophones le 20 juin 2002.
Plus  de  90%  des  forums  communautaires  français  ferment,  et  ce
mouvement  de  protestation  s'étend  même à l'étranger. Le 18 juillet
2002,  à  la  suite  de  nouvelles  affaires  impliquant des forums de
discussion  (CPAM  Nantes,  et Domexpo), la Ligue impulse une nouvelle
grève  des  forums.  C'est plus de 40.000 pétitions qui seront signées
par  les  internautes  français  afin  de  demander au législateur des
textes  de  loi clairs, adaptés à la réalité du Net, et protégeant les
hébergeurs,  prestataires  de  forums, webmestres, et propriétaires de
noms  de  domaine.  Le  22  Août  2002,  des représentants de la Ligue
Haut-Débit  sont  reçus par le conseiller TIC du Premier Ministre, lui
relaient  les  voix  des  internautes  français,  et  lui exposent les
dangers  du  vide  juridique entourant les forums de discussions et la
nécessité   d'établir   des  textes  clairs  garantissant  la  liberté
d'expression.

Le  10  Juin  2003,  alors  que la dgccrf a reçu plusieurs milliers de
plaintes  de  consommateurs,  le Tribunal de Commerce de Lyon place la
société pere-noel.fr en liquidation judiciaire.
Le  19  Novembre 2003, soit un an et demi après la condamnation éclair
du    titulaire    de    nom   de   domaine   et   du   webmestre   de
defense-consommateur.org,  le  tribunal correctionnel de Saint-Etienne
condamne  l'ex-pdg  de  pere-noel.fr  à  30  mois de prison ferme pour
publicité mensongère, tromperie, entrave à l'exercice de la profession
d'inspecteur  du  travail  et  refus  de  communiquer  des documents à
la Direction  générale  de  la consommation, concurrence et repression
des fraudes, et un mandat d'arrêt est délivré contre lui.....

-CPAM Nantes
Le  21  Juin  2002,  le Directeur de la CPAM Nantes assigne le médecin
webmaster du site de la coordination nationale des médecins, ainsi que
l'hebergeur du site, et le prestataire de forum (les-forums.com) , des
médecins  ayant tenus des propos peu urbains à l'égard du Directeur de
la  cpam. _Aucun_ de ces médecins n'est poursuivi... Le prestataire de
forum,  de  son  côté a immédiatement désactivé le forum incriminé. Sa
réaction, pleine de bon sens, restera dans les annales du Net français
:"si  on  m'accuse  moi,  pourquoi  pas non plus celui qui héberge mes
serveurs  voir ceux qui lui louent la salle..... c'est n'importe quoi"
On  serait  tenté  d'ajouter  :  "et  pourquoi  pas  EDF  qui  fournit
l'electricité  qui alimente les machines, ou Microsoft qui a fourni le
système d'exploitation?".
Cette  affaire  se  termine  le  28  juin  2003  par la signature d'un
protocole d'accord enteriné par le juge. L'hébergeur et le prestataire
de forum sont quant à eux écartés de la procédure.

-Domexpo
Le  5  Juin  2002,  une  ordonnance de référé du TGI de Toulouse, à la
suite  de l'action intentée contre l'hébergeur et le webmestre du site
ideesmaison.com  par  domexpo,  impose  la  suppression  des  messages
litigieux  postés  sur le forum du site, ainsi que la suspension de la
diffusion de tout nouveau message, précisant que "cette mesure cessera
de  plein  droit  à l'expiration d'un délai de un mois à compter de ce
jour  si l'association domexpo ne justifiait pas de la saisine du juge
de  fond  compétent  d'une  demande tendant à voir juger du contenu du
site  en  cause" : Le 28 Juin 2002, l'association domexpo assignait le
webmestre  d'ideesmaison.com  pour  les propos publiés sur le forum du
site.  A  ce  jour,  l'affaire  est _toujours_ en cours, et le forum a
disparu de la surface du web...
L'ordonnance  de  référé  apportait  cependant la précision suivante :
"[...]  cette  suspension  ne  peut  toutefois  qu'être  temporaire en
référé,  seul  un  débat  devant  le juge du fond pouvant permettre de
déterminer de l'illégalité, de l'illicéité ou du caractère dommageable
du  contenu  d'un site litigieux ainsi que des initiatives à prendre à
l'effet  de  mettre un terme définitif au trouble subi par les tiers."
Dont acte.

-Le "remède" pire que le mal(chilling effect/délocalisation/filtrage)
Lors  de  la  première  lecture  au  Sénat, où le débat sémantique fut
kafkaïen,  l'article  43-8 (ne concernant dans sa version actuelle que
les  hébergeurs,  tout  comme  d'ailleurs l'article 14 de la directive
européenne  2000/31/CE  ne  mentionne  que  les hébergeurs, ce que, au
demeurant, nul ne conteste à Bercy) a été amendé de façon à "modifier"
le  champ  des acteurs qu'il concerne: En proposant, dans l'expression
alambiquée  qui  décrit  ces acteurs, de remplacer "stockage direct et
permanent"  par "stockage durable", le rapporteur de la commission des
affaires  économiques  expliquait  que  cela permettrait d'exclure les
prestataires  de  cache, et d'inclure les prestataires de forums. Ce à
quoi   Nicole  Fontaine  répondait  qu'effectivement  cela  permettait
d'exclure   les  prestataires  de  cache,  mais  précisait  que  :"ces
amendements  ne  visent  pas à définir le régime de responsabilité des
prestataires de forums".... et ces amendements furent adoptés.

La  question -symptomatique- reste donc entière : Qui est concerné par
l'  article  43-8 (et donc par les articles 43-9 et 43-14)? Comment un
acteur du Net français pourrait-il respecter une loi s'il ne sait même
pas  si  cette  loi  le  concerne?  En  l'état, la loi Fontaine est un
traquenard juridique.

Force  est de constater qu'en omettant de cartographier les acteurs du
Net,  la  loi  proposée  par  Nicole  Fontaine  va  très  exactement à
l'encontre  d'une  évidente  nécessité  de  clarification par ailleurs
affirmée   par   le  Premier  Ministre  :  en  se  défaussant  sur  la
jurisprudence,  elle  change  les  acteurs  du Net français en rats de
laboratoire.

Nicole Fontaine doit donc expliquer clairement à l'assemblée si oui ou
non   il   s'agit   effectivement   d'engager  la  responsabilité  des
prestataires  de  forums.Si  tel  était  le  cas,  au  vu des affaires
perenoel.fr  et  domexpo ayant eu lieu sous l'actuel 43-8, sachant les
protestations  exprimées  par  les  internautes,  en  particulier    à
l'occasion  des  journées  0forum, au cours desquelles plus de 90% des
forums  communautaires  français ont fermé et plus de 40.000 pétitions
ont  été  signées,  sachant que plus de 30.000 mails ont été envoyés à
Jacques  Chirac et autant à Jean-Pierre Raffarin pour protester contre
les  articles  43-8  et 9 du projet de loi, alors le message de Nicole
Fontaine deviendrait assez clair pour les internautes:"vous avez juste
le droit de vous faire arnaquer en ligne en silence!"

Les  conséquences seraient par ailleurs aussi simples qu'inéluctables:
les  prestataires  de forums français cesseraient leur activité sur le
sol  français, et les forums français fermeraient ou iraient s'abriter
derrière  le  premier  amendement de la constitution américaine contre
lequel le législateur est impuissant, sauf à instaurer un filtrage aux
frontières comme en Chine Populaire.

Le projet de loi de Nicole Fontaine légitimerait la délocalisation des
forums  de  discussion  français  aux  Etats-Unis, et confronterait le
législateur au choix éminemment politique du filtrage, qui serait jugé
à sa juste valeur par les démocraties occidentales.

Et  dire  qu'à  la  suite  de  l'annonce  du plan reso2007, le site du
Premier  Ministre  annonçait  le  projet  de loi de Nicole Fontaine en
expliquant   :"Ces   mesures  doivent  réponrde  à  un  paradoxe.  Les
prestataires  assurant  un  hébergement des contenus, se sont en effet
retrouvés  devant  les tribunaux, avec ou parfois en lieu et place des
webmestres   assurant   le  contrôle  éditorial  des  pages  ou  sites
incriminés."

Paradoxe  suivant:  Le  statut  du webmestre décrit comme "assurant le
contrôle  éditorial"... Fort bien... Quid du webmestre qui propose sur
son  site  un  forum  http?  Devrait-il  être  responsable  de  ce que
n'importe  quel  internaute  peut  poster  à n'importe quel moment sur
ledit  forum depuis n'importe quel point de la planète? A 80.000 euros
(voire  200.000)  l'assignation,  la probabilité de trouver des forums
http  sur  le  web  français  va  tendre  vers  zéro.  Là  encore, les
webmestres  (par  exemple  de  sites  de  défense  des  consommateurs)
n'auront plus qu'à délocaliser...

Autre point en matière de responsabilité des contributions postées sur
les  forums  de discussion : Quid de Usenet? S'orienterait-on vers une
loi protocole-dépendante (http vs nttp)?
On  pourrait  aussi parler du concept de "directeur de publication", à
l'évidence  totalement  invalide  en  ce  qui  concerne les forums, ou
encore de la modération (qui serait assez fou pour endosser le rôle de
modérateur  et  devenir  aux  yeux de la justice l'auteur principal de
n'importe  quelle  contribution?),  et  de  nombreux  autres problèmes
auxquels le projet de loi de Nicole Fontaine est totalement aveugle...

A  l'évidence,  le  texte  de  Nicole  Fontaine n'est pas suffisamment
abouti  pour  être  valablement présenté au parlement, et n'apporte ni
confiance ni clarification, bien au contraire.


Et bientôt les hyperliens?
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Un  peu  de  prospective : Après les sites et les forums, il s'agirait
bientôt  de  pénaliser  le tissu sanguin du web qu'est l'hyperlien...A
titre  d'exemple,  dans  une  récente publication, le Forum des Droits
recommande  aux  exploitants  de  moteurs de recherche de "procéder au
déréférencement  immédiat des pages à caractère illicite dès qu'ils en
ont  connaissance".  Est-ce  à  dire  que  là  encore,  ce  serait   à
l'exploitant  de se substituer à l'autorité judiciaire? Et, encore une
fois, le déréférencement devrait être "immédiat"?
Considérons donc un exemple _réel_ décrit par l'AFA :
"Un  prestataire  d'annuaire  membre  de  l'AFA a reçu de la part du «
Comité  officiel  Geneviève  et  Xavier  de  Fontenay » une demande de
désindexation  du  « Comité Miss France » supposé usurper la marque du
premier.  Le  demandeur  a  fourni, à l'appui de sa demande, plusieurs
jurisprudences  lui  faisant  droit. L'exploitant de l'annuaire a donc
procédé à la désindexation de ce site « comité Miss France ». Or, lors
des championnats « Miss monde » suivants, la candidate choisie pour la
France  a  été celle du « Comité Miss France » et non celle du «Comité
officiel Geneviève et Xavier de Fontenay ». L'exploitant de l'annuaire
a  appris  à  cette  occasion  que la bataille juridique concernant la
marque   datait   de   1956   et   n'était   toujours   pas   tranchée
définitivement."

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Au total, _objectivement_, au vu de ces affaires bien réelles, comment
le législateur pourrait-il raisonnablement un seul instant exiger d'un
intermédiaire technique qu'il se substitue au juge _avec_promptitude_,
alors  qu'il n'en a pas les compétences, et que la justice elle-même a
besoin de temps pour s'y retrouver?
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La dérive solipsiste de Nicole Fontaine :
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La   commission   supérieure   du   service   public   des  postes  et
télécommunications  a  dénoncé  le  10  décembre  2002 dans un avis de
protestation  le manquement du gouvernement à son devoir d'information
du  parlement : "La Commission supérieure du service public des postes
et  télécommunications  (CSSPPT),  dont  la  composition  vient d'être
largement  modifiée, saisie le 20 novembre 2002 sur un avant-projet de
loi relatif à l'économie numérique, créant ou modifiant, notamment, le
code  des  postes  et  télécommunications en ses articles L. 32-16, L.
32-3-4, L. 32-3-5, L. 33-4-1, L. 34-11, L. 97-1, L. 97-2 et L. 97-3,
considérant  la  demande  du  gouvernement que réponse lui soit rendue
dans  un  délai  de  deux semaines, au mépris des droits de la CSSPPT,
maintes  fois  rappelés, de pouvoir travailler dans des conditions qui
garantissent  la  qualité  de  ses délibérations (notamment article D.
96-15 du code des postes et télécommunications),
considérant  qu'elle  est  une  fois de plus saisie sur un ensemble de
dispositions  floues,  disparates, sans liens évidents entres elles et
sans  que  le  gouvernement lui ait présenté la stratégie globale dans
laquelle  elles  s'insèrent  ;  et  estimant que le gouvernement a, en
cela, manqué à son devoir d'information du Parlement,
A  DECIDE  D'EMETTRE  UN AVIS DE PROTESTATION ET DE LE FAIRE CONNAITRE
AUX DIFFERENTS MINISTRES SUSCEPTIBLES DE LA SAISIR."
Dans  ce  même avis, la cssppt exposait de plus clairement sa position
quant à la responsabilité des intermédiaires techniques et au filtrage
:"[...]C'est  pourquoi, elle fait part à la ministre chargée de porter
le présent avant-projet de loi :
- de son refus de l'option prise de faire endosser des responsabilités
civile  et  pénale  aux intermédiaires techniques en leur déléguant un
rôle  d'appréciation  sur  la  teneur  licite ou non d'activités ou de
contenus, qui est du ressort exclusif de l'autorité judiciaire ;
-  d'une  contre-proposition consistant à instaurer une " procédure de
coupure sur notification ", qui engage la responsabilité sur celui qui
demande  la  coupure  parce  qu'il s'estime victime d'un préjudice, si
cette demande se révèle abusive ;
-  d'une  demande  de  suppression de la nouvelle version de l'article
43-8-3  sur le pouvoir d'injonction qui serait donné au juge et qui se
heurtera  à  des difficultés - voire des incompatibilités - techniques
et juridiques."

En  première  lecture à l'Assemblée, C'est le député Dionis qui, alors
qu'il  avait  auditionné  de  nombreux acteurs, se voyait contraint de
retirer  ses  amendements : La veille de l'examen en première lecture,
le  conseiller du Premier Ministre déclarait à la presse que ce serait
le  texte  de  Nicole  Fontaine qui passerait... Nicole Fontaine ne se
prive pas des bénéfices d'un arbitrage favorable.

Au  Sénat, en première lecture, le Sénateur Trégouët, intervenait dans
un  premier  temps  pour  dénoncer  la privatisation de la justice, et
présentait  ses amendements : Nicole Fontaine lui demandant de retirer
son amendement 136, il se levait, et, animé d'un courage politique peu
commun,  tenait  tête  en  maintenant  son  amendement.  Face        à
l'intransigeance  de Nicole Fontaine, il se retirait des débats. C'est
l'opposition qui votait pour les amendements Trégouët! Nicole Fontaine
faisait enregister son texte.


L'alibi de l'Europe et le pseudo-conflit de transposition :
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A chaque présentation de son projet, Nicole Fontaine s'abrite derrière
le  sophisme  du  retard  de  transposition de la directive européenne
2000/31/CE  qu'il est censé transposer. Pas une fois elle ne mentionne
l'article  21  de  cette directive, qui stipule qu'elle aurait dû être
réexaminée  avant le 17 juillet 2003... Pas une fois elle ne mentionne
que   l'actuel   43-8   (qui,   après  censure  partielle  du  Conseil
Constitutionnel,   affirme   le   rôle  incontournable  de  l'autorité
judiciaire)  est  déjà  conforme  à  la directive.Pas une fois elle ne
mentionne  que  c'est  au  droit  national  de  préciser  dans quelles
conditions   un   hébergeur   peut  avoir  connaissance  d'un  contenu
apparemment illicite.

Les   articles  43-8  et  43-9  ne  sont  pas  conformes  au  principe
fondamental du droit qui réserve à l'autorité judiciaire le pouvoir de
dire  le  droit:  En  droit  français, une activité ou une information
acquièrent  leur  caractère  illicite  par  décision d'un juge. Nicole
Fontaine ne peut ignorer que ce principe _n'est_pas_ incompatible avec
la  directive européenne, ce que, au demeurant, Danièle Pourtaud lui a
rappelé  lors  de  la  première lecture au Sénat: _personne_ n'a pu la
contredire.

Il convient donc de le réaffirmer clairement dans les articles concernés.


L'étiologie réelle du texte : le lobbying agressif des majors
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(un secret de polichinelle)...

Ce  n'est  plus un secret pour personne : ce projet de Loi a été écrit
sous  la  pression  des Majors qui imaginent qu'il leur permettrait de
lutter contre le téléchargement de fichiers musicaux via -entre autre-
les  réseaux p2p. Demandez par exemple à Nicole Fontaine pourquoi elle
refuse  de  supprimer l'exigence de filtrage : Parce que les majors ne
seraient pas d'accord.
Ce  lobbying  agressif  des  majors  a déjà été dénoncé publiquement à
l'assemblée  en  première  lecture,  tant  par  la  majorité  que  par
l'opposition.
Le  lobby  des  majors,  le  CLIC  (Comité  de  Liaison des Industries
Culturelles),  faisait  pression  pour  faire  retirer les amendements
Dionis  à  la veille de l'examen en première lecture à l'assemblée, et
c'est effectivement ce qui est arrivé. Au même moment, les producteurs
de disques exerçaient le même type de pression,comme si l'instauration
d'une  justice  privée  sur  le  Net  était de nature à défendre leurs
intérêts...
Le  député  Dionis  dénonçait alors dans la presse l'impact des majors
sur  le  projet  de  loi:  ''Alors que ce texte devait fonder le droit
d'Internet,    il    devient    anachronique    à   cause   d'intérêts
particuliers"..."Ils  espèrent enrayer une crise grave avec des moyens
absurdes et s'engouffrent dans une impasse"

Ce  n'est  certainement  pas en sacrifiant les droits fondamentaux des
internautes  que le législateur pourra rassurer le monde de la musique
:  c'est  même  exactement le contraire qui risquerait bien d'arriver.
Si,  sous  la  pression  des  majors,  la  justice  du Net devait être
privatisée,  avec les inéluctables atteintes à la liberté d'expression
que   cela  entraînerait,  il  y  a  fort  à  parier  que  bon  nombre
d'internautes  se  sentiraient  alors peu enclins à dépenser ne fût-ce
qu'un  centime à acheter de la musique, que ce soit sous la forme d'un
CD, ou en ligne.....
Et que diraient les Majors, si, le cas échéant, leur était imposée une
justice privée analogue à celle qu'elles essaient de faire imposer sur
le Net français?
L'instauration   d'une  censure  privée  sur  le  Net  français  n'est
certainement  pas  la réponse la plus adaptée à l'inquiétude du milieu
musical,  c'est  par  contre  le meilleur moyen de faire de l'Internet
français une poudrière juridique.

Si  le texte de Nicole Fontaine est aveugle à la réalité du Net, c'est
parce qu'il se polarise à la demande de l'industrie phonographique sur
le  problème  du  téléchargement  de  fichiers  mp3  sur  les  réseaux
peer2peer  : aveuglée par la problématique des droits d'auteur, Nicole
Fontaine s'est tout simplement trompée de projet de loi.


En conclusion :
---------------
S'il  est  _évident_  que  tout  n'est  pas  permis dans la République
numérique comme dans la République réelle, il n'en reste pas moins que
dans  la  justice  numérique,  c'est à l'autorité judiciaire de juger,
comme dans la justice réelle.

Que les hébergeurs hébergent, et que les juges jugent. Qu'il y ait une
censure  sur  le  Net?  Pourquoi  pas... A une seule condition : Après
l'intervention  d'un juge indépendant et impartial disposant de textes
clairs  et  adaptés  à  la  réalité  du  Net. C'est seulement dans ces
conditions   qu'une   loi   pourra  prétendre  apporter  confiance  et
clarification.  A  défaut,  si  même le législateur ne comprend pas le
texte qui lui est proposé, comment un juge, pourrait-il s'y retrouver?
Et comment un simple internaute pourrait-il respecter une loi si ni le
législateur ni le juge ne comprennent quels sont les acteurs concernés
par tel ou tel de ses articles?

Il est donc demandé que le législateur s'attache non seulement à faire
respecter  le  principe  fondamental du droit qui réserve à l'autorité
judiciaire  le  pouvoir  de  juger,  qu'il  garantisse  le droit à une
justice  indépendante et impartiale à tout citoyen, fût-il internaute,
mais aussi, et surtout, qu'il commence par le commencement, à savoir :
définir  quels  sont  les  acteurs de l'Internet, avant de rédiger des
articles   dont   nul   ne   saurait  précisément  quels  acteurs  ils
concerneraient.

Le sénateur Trégouët aura prévenu :
" IL NE VOUS RESTERA QUE VOS YEUX POUR PLEURER!"

Veuillez recevoir, Monsieur le Député, mes salutations républicaines.

Documents, liens, informations complémentaires :
http://www.odebi.org/deputes/0justice.html


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